JOHN MAYALL: Nobody Told Me (2018)
Malgré un problème de santé, juste après l’enregistrement de cet album, John Mayall, 85 ans, continue de sortir des disques, et de donner des concerts, une cinquantaine de dates en Europe en mars/avril suivie d’une tournée américaine cet été. Et pour son nouvel album, il a invité quelques-uns de ses guitaristes préférés. Liste surprenante où figure Todd Rundgren, Steve Van Zandt, l’homme du E Street Band, ou Alex Lifeson qui officie chez Rush. Pas vraiment des guitaristes de blues, mais quand même la présence de Joe Bonamassa et de Larry McCray est plus « logique ». La section rythmique habituelle de Mayall, Greg Rzab à la guitare basse et Jay Davenport à la batterie, est présente, épaulée par Billy Watts (Lucinda Williams) à la guitare. Autre nouveauté, Carolyn Wonderland, qui chante sur plusieurs morceaux, a rejoint le groupe, au moins pour la tournée. L’album a été produit par Eric Corne, fondateur de Forty Below Records, au studio 606 de The Foo Fighters sur la même console légendaire de Sound City Neve, que Fleetwood Mac avait utilisée pour enregistrer l’album Rumours. Quel que soit le CV des invités, un album de Mayall sonne comme du Mayall. On ne vit pas dans le blues depuis des dizaines d’années pour ne pas continuer de tracer son sillon. Et sur le premier titre Joe Bonamassa en personne met sa guitare au service du patriarche, se fond dans la musique (il faut admettre que le Bonamassa est peu du genre caméléon), et puis avec les cuivres qui pulsent on se dit que non, on a « pas fait de mal ». Tiens un genre de truc qui m’énerve : Larry McCray n’a jamais été reconnu à la hauteur de son immense talent c’est lui qui tient le lead dans "The Moon is Full", un titre mâtiné de funk, et qui envoie du plomb sur "The Hurt Inside" du regretté Gary Moore. Quand je pense, que suite à une erreur de date, j’ai loupé Larry à Chicago en 2016 ! Et première surprise, la performance d’Alex Lifeson, qui fait dans le genre rock progressif avec Rush, nous sort un superbe solo dans la dernière partie de la reprise du Jeff Healey Band «Evil And Here To Stay». Le père Mayall a toujours fait marcher les musiciens à la baguette ! Todd Rundgren participe à «That’s What Love Will You You Do» de Little Milton et c’est le chant de Mayall qui est un peu juste mais le morceau retrouve néanmoins l’esprit de Booker T., les MG avec les Memphis Horns. L’homme des Soprano, qui a un bon bagage rock avec le Boss, se montre aussi à son avantage dans « It’s So Tough », et puis Bonamassa démontre, que bien canalisé, il est capable de nous sortir une petite merveille, « Delta Hurricane ». Il convient de souligner enfin la performance de Carolyn Wonderland qui, outre ses talents de chanteuse, chose assez rare, voire exceptionnelle, dans la carrière de John, nous gratifie de superbes envolées de slide dans « Distant Lonesome Train ». Son apport donne une profondeur nouvelle à la musique de Mayall. Au final, un des meilleurs albums de Mayall depuis un moment, allez depuis le départ du fabuleux Buddy Whittington.
Michel Bertelle